samedi 10 avril 2010

STTR : les accommodements avant les parents

Il y avait de quoi avaler son café de travers ce samedi à la lecture, dans le quotidien mauricien, de la lettre de Josée Michel, cette conductrice d’autobus à l’emploi de la Société de Transport de Trois-Rivières depuis trois ans et huit mois.  Cette dame affirme que ses employeurs lui auraient refusé à deux reprises de travailler à temps partiel à la naissance d’un enfant et ce, malgré une demande syndicale à cet effet pour le deuxième rejeton.  Le motif invoqué par ces âmes charitables, au diapason des réalités parentales des années 2010 : si elle a des conflits d’horaire, c’est pas leur problème.  Brillante réponse, dans son extrême simplicité.  Il suffisait d’y penser et ces dirigeants en auront fait l’effort.
Si les faits allégués sont exacts, non seulement pareil comportement de la STTR trahit-il un manque d’empathie flagrant, mais il se révèle implicitement d’une lâcheté indéniable.  Selon Mme Michel, l’avocat de la compagnie aurait en effet eu le culot de lui préciser que son cas ne relevait en rien des accommodements religieux. L’attitude de l’employeur ne brimerait donc aucunement ses droits et libertés pour cette seule et unique raison.

Bref, le droit à une vie familiale et à la liberté d’élever ses enfants correctement compterait moins, aux yeux de ces responsables, que le privilège de s’absenter lors du Shabbat ou de stopper l’autobus pour une petite prière matinale. Si Mme Michel a bien compris les explications du juriste (souhaitons qu’il y ait eu un malentendu, bientôt dissipé), les hauts responsables de la STTR s’avèrent tout aussi dépourvus d’humanité que de discernement.

Rappelons que ce différend n’est pas survenu à Montréal entre une conductrice et la STCUM, mais bien dans notre conservatrice Mauricie, si souvent perçue par la métropole comme injustement paranoïaque envers les communautés culturelles.  Sommes-nous assez fâcheux pour voir des envahisseurs partout ?  Pourquoi s’énerver, par exemple, des locaux et tapis de prière, gracieusement offerts aux étudiants et enseignants musulmans par l’UQTR, et des horaires de cafétéria spécialement adaptés au ramadan ?  Le banal précepte d’amener son lunch n’est sans doute pas enchâssé dans le Coran. Trop simple et puis, on impose rien à personne.

Si les propos de Mme Michel sont exacts, l’attitude de son employeur est d’autant plus obtuse que la STTR ne manque pas de chauffeurs et que plusieurs seraient ravis de combler les heures laissées disponibles par la conductrice.  Où donc alors serait le problème ?  En attendant, la chauffeuse affirme que non seulement ses supérieurs restent sourds à ses demandes, mais que le maire lui-même, au courant des faits, refuserait d’intervenir. 

Comment expliquer qu’après 40 ans de féminisme, un organisme municipal, payé à même nos taxes inflationnistes, n’aurait pas l’élémentaire décence de reconnaître le droit d’une mère à la conciliation travail-famille alors qu’il serait apparemment prêt à se prosterner devant les demandes d’accommodements soi-disant raisonnables ?  S’il y a des éclaircissements ou des réfutations à fournir sur un tableau aussi peu reluisant, la STTR doit s’exécuter.  Autrement, les conclusions s’imposeront d’elles-mêmes.


Également paru dans Le Nouvelliste du 15 avril 2010.

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